« Tout esclave a en main le pouvoir de briser sa servitude. »
William Shakespeare
Jules César, 1623
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« Tout esclave a en main le pouvoir de briser sa servitude. »
William Shakespeare
Jules César, 1623
« Quelle malédiction a frappé l’Occident pour qu’au terme de son essor il ne produise que ces hommes d’affaires, ces épiciers, ces combinards aux regards nuls et aux sourires atrophiés, que l’on rencontre partout, en Italie comme en France, en Angleterre de même qu’en Allemagne ? Est-ce à ces dégénérés que devait aboutir une civilisation aussi délicate, aussi complexe ? Peut-être fallait-il en passer par là, par l’abjection, pour pouvoir imaginer un autre genre d’hommes. »
Emil Cioran
Histoire et utopie, éditions Gallimard, 1960
« Rien n’est plus doux que la patrie, dit un commun proverbe. Est-il en effet rien de plus aimable, de plus auguste, de plus divin ? Seulement, tout ce que les hommes regardent comme divin et auguste, n’est tel qu’en raison de la patrie, cause et maîtresse souveraine, qui donne à chacun la naissance, la nourriture et l’éducation. On peut admirer la grandeur, la beauté et la magnificence des autres cités ; mais on ne chérit que celle où l’on a reçu le jour ; et, de tous les voyageurs qu’entraîne le plaisir de voir un spectacle agréable, il n’en est aucun qui se laisse séduire par les merveilles qu’il trouve chez les autres peuples, au point d’oublier entièrement le lieu de sa naissance.
[…] C’est dans la patrie que chacun de nous a vu d’abord luire le soleil. Ce dieu, généralement adoré de tous les hommes, est encore en particulier le dieu de leur patrie ; sans doute parce que c’est là qu’ils ont commencé à jouir de son aspect, articulé les premiers sons, répété le langage de leurs parents, appris à connaître les dieux. Si la patrie que le sort nous a donnée est telle que nous ayons besoin d’aller puiser ailleurs une éducation plus relevée, c’est encore à elle que nous devons savoir gré de cette éducation, puisque sans elle nous n’eussions pas connu le nom de cette ville ; nous ne nous serions pas doutés de son existence.
Si l’on veut bien comprendre l’attachement que de bons citoyens doivent avoir pour la patrie, il faut s’adresser à ceux qui sont nés dans un autre pays. Les étrangers, comme des enfants illégitimes, changent facilement de séjour ; le nom de patrie, loin de leur être cher, leur est inconnu. Partout où ils espèrent se procurer plus abondamment de quoi suffire à leurs besoins, ils s’y transportent, et mettent leur bonheur dans la satisfaction de leurs appétits. Mais ceux pour qui la patrie est une mère, chérissent la terre qui les a nourris, fût-elle petite, âpre, stérile. S’ils ne peuvent en louer la fertilité, ils ne manqueront pas d’autre matière à leurs éloges. Entendent-ils d’autres peuples louer, vanter leurs vastes prairies émaillées de mille fleurs, ils n’oublient point de louer aussi le lieu de leur naissance, et, dédaignant la contrée qui nourrit les coursiers, ils célèbrent le pays qui nourrit la jeunesse.
Oui, tous les hommes s’empressent de retourner dans leur patrie, jusqu’à l’insulaire, qui pourrait jouir ailleurs de la félicité ; il refuse l’immortalité qui pourrait lui est offerte, il préfère un tombeau dans la terre natale, et la fumée de sa patrie lui paraît plus brillante que le feu qui luit dans un autre pays.
La patrie est donc pour tous les hommes un bien si précieux, que partout les législateurs ont prononcé contre les plus grands crimes, comme la peine la plus terrible, l’exil. Et il n’y a pas que les législateurs qui pensent ainsi : les chefs d’armée qui veulent entraîner leurs troupes rangées pour la bataille, ne trouvent rien à leur dire que ces mots : « Vous combattez pour votre pays ! » Il n’y a personne qui, en les entendant, veuille être lâche ; et le soldat timide se sent du cœur au nom de la patrie. »
Lucien de Samosate
v. 120 – 180
« Votre délire d’égalité était une attaque meurtrière contre l’être, contre toutes ses richesses et ses valeurs ; c’était la soif de piller le monde divin et d’anéantir toute grandeur ici-bas. L’esprit du néant vous anime, c’est lui qui vous a inspiré ces idées et ces passions égalitaires. La loi de l’entropie, qui mène à la mort par une diffusion égale de la chaleur, agit à travers vous dans la vie sociale […] Exiger l’égalité absolue, c’est vouloir retourner à l’état originel, chaotique, ténébreux, au nivellement et à la non-différenciation ; c’est vouloir le néant. L’exigence révolutionnaire du retour à l’égalité dans le néant est née du refus d’assumer les sacrifices et les souffrances par lesquels passe la voie de la vie supérieure. Voilà la réaction la plus effrayante, la négation du sens de tout le processus créateur du monde. L’enthousiasme de la révolution est un enthousiasme réactionnaire. L’exigence contraignante de l’égalisation qui procède de l’obscurité chaotique est une tentative pour détruire la structure hiérarchique du cosmos formé par la naissance créatrice de la lumière dans les ténèbres ; c’est un essai pour détruire la personne même de l’homme en tant que degré hiérarchique né dans l’inégalité ; c’est un attentat contre la place royale de l’homme dans l’ordre cosmique. »
Nicolas Berdiaev
De l’inégalité, Éditions L’Âge d’homme, 2008
« Faire une œuvre de vie de ce qui était lettre morte, comprendre ce que l’on est, découvrir comment vivre et agir selon notre tradition, voilà notre tâche. Ce n’est pas seulement un préalable à l’action. La pensée est l’action. Notre monde ne sera pas sauvé par des savants aveugles ou des érudits blasés. Il sera sauvé par des poètes et des combattants, par ceux qui auront forgé l’« épée magique » dont parlait Ernst Jünger, l’épée spirituelle qui fait pâlir les monstres et les tyrans. Notre monde sera sauvé par les veilleurs postés aux frontières du royaume et du temps. »
Dominique Venner
Histoire et tradition des Européens, Éditions du Rocher, coll. Histoire, 2002
« À quoi sert le militantisme ? Rarement à faire avancer la cause que l’on défend, mais avant tout à se former soi-même. À se doter d’un caractère. À se structurer, physiquement et mentalement. Le militantisme est une école. Le militantisme est un don de soi. Mais il peut aussi être une aliénation. Il aliène chaque fois qu’il empêche de penser par soi-même. […] Il permet d’acquérir une armure, mais peut faire oublier que la cuirasse n’est pas le corps. Il y a une énorme différence entre un esprit engagé et un esprit partisan. Même au service de la meilleure des causes, un esprit partisan n’est jamais un esprit libre. L’important est de toujours s’engager à temps complet, avec désintéressement. La priorité, c’est toujours l’au-delà de soi. »
Alain de Benoist
ID magazine, n°9, printemps 2007
« À l’ENA, on ne leur a pas appris la différence entre la politique et le politique. On leur a seulement parlé de régimes politiques, de pratique gouvernementale et de météorologie électorale. La plupart d’entre eux s’imaginent que la politique se réduit à une gestion administrative inspirée du management des grandes entreprises. C’est, là, confondre le gouvernement des hommes avec l’administration des choses, et croire qu’il faut s’en remettre à l’avis des techniciens et des experts. Dans une telle optique, il n’y aurait pour chaque problème politique qu’une seule solution optimale : « Il n’y a pas d’alternative » est un mot d’ordre typiquement impolitique. En politique, il y a toujours des alternatives parce qu’un même fait peut toujours être jugé différemment selon le contexte et les critères d’appréciation retenus. Une autre forme classique d’impolitique consiste à croire que les fins du politique peuvent être déterminées par des catégories qui lui sont étrangères – économiques, esthétiques ou morales par exemple. En réalité, chaque activité humaine a sa propre finalité, sa propre morale et ses propres moyens. Dire qu’il y a une essence du politique, c’est dire que la politique est une activité consubstantielle à l’existence humaine au seul motif que l’homme est, par nature, un animal politique et social, et que la société ne dérive pas, contrairement à ce qu’affirment les théoriciens du contrat, d’un « état de nature » prépolitique ou présocial. [Pour] Julien Freund, comme toute activité humaine, la politique possède des présupposés, c’est-à-dire des conditions constitutives qui font qu’elle est ce qu’elle est, et non pas autre chose. Freund en retient trois : la relation du commandement et de l’obéissance, la relation du public et du privé, enfin la relation de l’ami et de l’ennemi. Cette dernière relation est déterminante, car il n’y a de politique que là où il y a possibilité d’un ennemi. Si, comme le dit Clausewitz, la guerre est la poursuite de la politique par d’autres moyens, c’est que le politique est intrinsèquement conflictuel. Il en résulte qu’un monde sans frontières serait un monde d’où le politique aurait disparu. C’est en ce sens qu’un État mondial est une absurdité. »
Alain de Benoist
Entretien avec Nicolas Gauthier, Boulevard Voltaire, 12 septembre 2014
« L’illusion égalitaire des démagogues est encore plus dangereuse que la brutalité des traîneurs de sabre… Pour l’anarque, constatation théorique, puisqu’il les évite les uns comme les autres. Qu’on vous opprime : on peut se redresser, à condition de n’y avoir pas perdu la vie. La victime de l’égalisation est ruinée, physiquement et moralement. »
Ernst Jünger
Eumeswil, 1977, trad. Henri Plard, éditions La Table Ronde, coll. Vermillon, 1978
« Écrire doit être un jeu dangereux. C’est la seule noblesse de l’écrivain, sa seule manière de participer aux luttes de la vie. L’écrivain politique ne peut se séparer du militant politique. Le penseur ne peut abandonner le guerrier.
Un certain nombre d’hommes de ce pays ont sauvé et l’honneur des lettres et l’honneur des armes. Ils ne furent pas tous du même camp lors de notre dernière guerre civile européenne mais ils sont nos frères et mes exemples. Je pense à Saint-Exupéry, abattu au cours d’une mission aérienne ; je pense à Robert Brasillach, fusillé à Montrouge ; je pense à Drieu La Rochelle, acculé au suicide dans sa cachette parisienne ; je pense à Jean Prévost, exécuté dans le maquis du Vercors.
Ceux-là n’ont pas triché. Ils n’ont pas abandonné les jeunes gens impatients et généreux qui leur avaient demandé des raisons de vivre et de mourir et qu’ils avaient engagés sur la voie étroite, rocailleuse et vertigineuse, de l’honneur et de la fidélité. »
Jean Mabire
La torche et le glaive, éditions Libres opinions, 1994 (texte paru initialement dans Europe Action N°30, juin 1965)
« L’État est juste, lorsque chacun des trois ordres qui le composent remplit le devoir qui lui est propre, et qu’il est en lui-même tempérant, courageux et sage, par certains dispositions et qualités relatives à ces trois ordres. »
Socrate selon Platon
Phédon, 81a-82c, IVe siècle av. notre ère
« Le fondement de tout véritable État, c’est la transcendance de son principe, c’est-à-dire du principe de la souveraineté, de l’autorité et de la légitimité. »
Julius Evola
Les Hommes au milieu des ruines (Gli uomini e le rovine), 1953, trad. Gérard Boulanger, éditions Pardès, 1984
« Le projet de l’État moderne, liquidateur de tout ce qui s’immisce entre lui et les individus, s’est paré de la protection des droits de l’individu. »
Hervé Juvin
La grande séparation, éditions Gallimard, 2013