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Citations sur le mercantilisme
Tel est le romantisme : une passionnante plongée dans le subconscient européen…
« Tel est le romantisme : une passionnante plongée dans le subconscient européen, un inventaire, non encore exhaustif, mais déjà d’une richesse incroyable, de notre domaine culturel. Après cela, l’Europe se consolide sous la forme que nous lui connaissons : bourgeoise, mercantile, colonialiste, démocratisante, niveleuse, nationaliste… »
Pierre Gripari
Critique et autocritique, éditions L’Âge d’Homme, 1981
Sur le champ de bataille d’Azincourt…
« Sur le champ de bataille d’Azincourt, la noblesse féodale, imbue d’idéal chevaleresque, a été battue à plate couture par une Angleterre déjà mercantile, qui s’embarrasse fort peu de courtoisie. La France ne se relèvera qu’avec Louis XI, le roi des marchands. »
Pierre Gripari
Critique et autocritique, éditions L’Âge d’Homme, 1981
Le calcul porte toujours sur le profit et la perte…
« Le calculateur est un lâche. Si je dis cela, c’est que le calcul porte toujours sur le profit et la perte et que, par conséquent, le calculateur n’est préoccupé que de profit et de perte. Mourir est une perte, vivre est un gain, aussi décide-t-on de ne pas mourir. On est donc un lâche. »
Jôchô Yamamoto
Hagakuré, livre I, rédaction 1709 – 1716, première édition 1900
Cité par Yukio Mishima
Le Japon moderne et l’éthique samouraï (Introduction to Hagakuré), 1967, trad. Émile Jean, éditions Gallimard, coll. Arcades, 1985
Ainsi la publicité vide de leur sens…
« Ainsi la publicité vide de leur sens les mots les plus essentiels, et rend absurde le langage. Derrière elle, le marché trahit des réalités qu’il absorbe : rendre tout bien échangeable et liquide, c’est à la fin détruire ce qui ne saurait devenir l’objet d’un échange marchand. La mobilisation générale qui constitue la dynamique du marché, cette extension perpétuelle pour ne rien laisser en dehors de la marche de l’économie, c’est, au sens littéral du terme, une liquidation générale. Vendre de la “présence”, c’est seulement révéler et emmurer encore notre infinie solitude ; commercialiser l’humain, c’est de toute évidence contribuer à construire un monde inhumain. Si elle va au bout de ce renversement universel, la société la plus prospère peut aussi bien devenir celle la plus grande misère… Cette misère n’a rien d’une fatalité : elle est un choix, le produit d’une vision du monde. »
François-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échapper à l’ère du mouvement perpétuel, Éditions Grasset, 2018
L’argent est maître sans limitation ni mesure…
« Pour la première fois dans l’histoire du monde l’argent est maître sans limitation ni mesure. Pour la première fois dans l’histoire du monde l’argent est seul en face de l’esprit. (Et même il est seul en face des autres matières.)
Pour la première fois dans l’histoire du monde l’argent est seul devant Dieu. »
Charles Péguy
Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne, 1914, in Œuvres complètes, Tome IX : Œuvres posthumes, éditions de la Nouvelle Revue Française, 1924
Les gens aujourd’hui rendent un culte aux objets…
« Les gens aujourd’hui rendent un culte aux objets, s’oublient derrière les miroirs qui ont remplacé leurs fenêtres. Ils ont mais refusent absolument d’être. »
Erik L’Homme
Un peu de nuit en plein jour, éditions Calmann-Lévy, 2019
À l’ère des plus grandes machines à bourlinguer, l’Acropole d’Athènes…
« À l’ère des plus grandes machines à bourlinguer, l’Acropole d’Athènes reçoit chaque année plus de visiteurs qu’elle n’en accueillit durant le total des vingt-cinq siècles qui précédèrent, au cours de ces époques bénies où elle était encore debout, vivante et fière. Ce pourrait être une consolation. Mais il faut se méfier des nombres. Ils sont trompeurs, jusque sur l’Acropole. Combien de voyageurs y viennent encore prier ? Et quels dieux ? Le scintillement du soleil propose une réponse : il rosit chaque soir de ses teintes mordorées les bleus épars du ciel couchant. »
Jean-François Gautier
À propos des Dieux. L’esprit des polythéismes, éditions La Nouvelle Librairie, coll. Longue Mémoire, 2020
L’ère du triomphalisme mercantile s’est achevée…
« Les années qui ont débouché sur la crise financière de 2008 furent l’âge d’or de la confiance grisante dans le marché et de la dérégulation qu’elle a entraînée – on pourrait les qualifier d’ère du triomphalisme du marché. Cette ère a commencé au début des années 1980, décennie où Ronald Reagan et Margaret Thatcher se sont dits certains que le marché, et non les États, était la clé de la prospérité et de la liberté ; puis ce mouvement s’est poursuivi dans les années 1990, période où s’est épanoui le libéralisme favorable au marché de Bill Clinton et de Tony Blair, lesquels ont en même temps tempéré et consolidé la conviction que le bien public repose surtout sur le marché.
À l’heure actuelle, cette confiance est battue en brèche. L’ère du triomphalisme mercantile s’est achevée. La crise financière a fait plus qu’amener à douter de l’aptitude du marché à répartir efficacement les risques : on s’accorde en outre à reconnaître depuis que celui-ci s’est tellement détaché de la morale qu’il est devenu indispensable de l’en rapprocher à nouveau d’une manière ou d’une autre. Mais, ce qui n’est pas évident, c’est ce qu’il faudrait entendre par là, ou comment il conviendrait de procéder.
Pour certains, un même défaut moral était au cœur du triomphalisme du marché : la cupidité, qui poussa à prendre des risques inconsidérés. Dans cette optique, la solution consisterait à juguler ce travers en exigeant que les banquiers et les décideurs de Wall Street fassent preuve de davantage d’intégrité et de responsabilité et en promulguant des réglementations assez intelligentes pour prévenir la répétition d’une crise similaire.
C’est un diagnostic partiel, au mieux, car, même si la cupidité a indéniablement concouru à déclencher la crise financière, quelque chose de plus important est en jeu. Le plus funeste de tous les changements propres aux trois dernières décennies n’a pas résidé dans cette avidité accrue : il tient à ce que le marché et les valeurs marchandes ont envahi des sphères de la vie où ils n’ont pas leur place. […] L’immixtion du marché, et des raisonnements qu’il induit, dans les aspects de la vie traditionnellement régis par des normes non marchandes est l’une des évolutions les plus significatives de notre temps. »
Michael Sandel
Ce que l’argent ne saurait acheter (What Money Can’t Buy : The Moral Limits of Markets), éditions du Seuil, 2014
L’homo œconomicus ne vise qu’à maximiser son utilité…
« Dans le domaine de la théorie économique, qui ne voit la similitude entre la théorie politique de Hobbes et la théorie économique libérale ? L’homme est réduit à sa double fonction de producteur et de consommateur. Dans sa relation aux autres, l’homo œconomicus ne vise qu’à maximiser son utilité, son intérêt individuel en dehors de toute considération de solidarité. La relation économique est à la fois concurrentielle et contractuelle. La concurrence pure, parfaite et non faussée est garantie par l’État et les Codes, civil et de commerce, en sont les normes.
Les principes de ces deux idéologies sont communs : les hommes sont de purs atomes, des monades leibnitziennes qui flottent quelque part dans le plasma inorganique de l’espace et du temps, hors-sol, interchangeables et équivalents, sans aucune détermination culturelle ou historique. »
Lionel Rondouin
Ce que nous sommes. Aux sources de l’identité européenne, Philippe Conrad dir., édition Institut Iliade / Pierre-Guillaume de Roux, 2018
Un grand journal ne peut se payer le luxe de critiquer les grands magasins…
« Deux fois dans ma vie un rédacteur-en-chef m’a dit qu’il n’osait pas imprimer ce que j’avais écrit de peur d’offenser les annonceurs de son journal. […] En ces deux occasions il me refusa la liberté d’expression parce que j’avais écrit que les grands magasins qui bénéficient de la publicité que l’on sait étaient en réalité pires que les petits magasins. C’est la une des choses, et elle est digne d’être relevée, qu’un homme n’a désormais plus le droit de dire ; peut-être même la seule chose qui lui soit réellement interdite. Si j’avais attaqué le gouvernement, on aurait trouvé cela très bien ; si j’avais attaqué Dieu, on aurait trouvé cela encore mieux. Si j’avais critiqué le mariage, le patriotisme ou la morale publique, j’aurais eu droit à la première page de la presse dominicale. Mais un grand journal ne peut se payer le luxe de critiquer les grands magasins, étant un grand magasin à sa manière et en passe de devenir lui-même un monopole. »
Gilbert Keith Chesterton
Plaidoyer pour une propriété anticapitaliste, 1926, trad. Gérard Joulié, éditions de l’Homme Nouveau, 2010
Par l’une de ces habituelles ruses de la raison…
« Par l’une de ces habituelles ruses de la raison chères à Hegel, le vrai sens de l’histoire sera dissimulé jusqu’au bout aux protagonistes qui occupent l’avant-scène de la révolte étudiante, mais ne voient rien de la pièce qu’ils sont en train de jouer, s’agitant, à l’image de Daniel Cohn-Bendit, le “divin rouquin”, comme des acteurs enivrés par leur logomachie et leur verbigération. Plus que les formes traditionnelles des luttes sociales et du combat politique en l’efficacité desquelles ils ne croient pas, les “enragés” s’attachent à mettre en avant la force subversive de la libération du désir. Contrairement à la prophétie de Raoul Vaneigem et des penseurs de l’Internationale situationniste, ce ne sera pas la société marchande qui cédera sous les coups des “guerriers du plaisir à outrance”, mais l’idéologie du désir qui servira l’expansion du marché. Sous couvert d’une contestation radicale du système, le modèle culturel de libération des mœurs porté par le mouvement se révélera infiniment mieux adapté aux exigences structurelles du capitalisme de consommation que l’encadrement normatif des sociétés traditionnelles. Sous les pavés, il n’y avait pas la plage, mais Paris Plages. »
Patrick Buisson
La Cause du peuple, éditions Perrin, 2016
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