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Le livre
Demeure. Pour échapper à l'ère du mouvement perpétuel

Demeure. Pour échapper à l'ère du mouvement perpétuel

Auteur : Fran­çois-Xavier Bellamy
Édi­teur : édi­tions Gras­set (3 octobre 2018)

Pré­sen­ta­tion de l’é­di­teur : Der­rière l’accélération par­tout consta­tée de nos vies indi­vi­duelles et de notre exis­tence sociale, il est un phé­no­mène plus essen­tiel encore, qui est deve­nu l’horizon abso­lu de la conscience occi­den­tale : le chan­ge­ment était, à l’âge clas­sique, une tran­si­tion entre deux moments de sta­bi­li­té. Mais notre civi­li­sa­tion semble entrée, avec la moder­ni­té, dans une nou­velle ère, qui fait du mou­ve­ment la loi uni­ver­selle. Si la vie est évo­lu­tion, si l’économie est crois­sance, si la poli­tique est pro­grès, tout ce qui ne se trans­forme pas doit dis­pa­raître. S’adapter, se réfor­mer, res­ter dyna­mique, voi­là nos ver­tus car­di­nales ; la mode rem­place tous nos cri­tères, le flux prend la place de l’être, et le chiffre de la lettre.
Alors que la crise contem­po­raine qui touche le monde occi­den­tal porte le symp­tôme d’une forme d’épuisement inté­rieur, et alors que notre rap­port à l’ac­cé­lé­ra­tion actuelle des inno­va­tions tech­no­lo­giques sera le grand défi poli­tique des années à venir, il importe d’interroger, de façon à la fois appro­fon­die et concrète, le dés­équi­libre créé par cette inca­pa­ci­té au repos, par cet oubli des sta­bi­li­tés les plus néces­saires à nos vies. Afin de redé­cou­vrir ce que notre fas­ci­na­tion pour le mou­ve­ment nous avait fait oublier : l’essentiel de nos exis­tences se trouve peut-être bien plus dans ce qui est reçu et trans­mis, que dans ce qui est trans­for­mé. Il n’est pas de créa­tion spon­ta­née qui s’épanouisse sans racines, pas de voyage vers l’ailleurs qui ne sup­pose un domaine fami­lier, pas de socié­té qui s’améliore sans cher­cher le bien dans ce qu’il a d’éternel. Ce qui rend pos­sible le mou­ve­ment de toute vie, et ce qui lui donne un sens, c’est tou­jours ce qui demeure.
Cet ouvrage, dense et écrit de façon lim­pide, brasse ain­si, et aus­si bien, des que­relles méta­phy­siques fon­da­men­tales (Héra­clite contre Par­mé­nide) et des acti­vi­tés d’apparence déri­soire (le jog­ging), des figures illustres (Péguy, Pas­cal, Rous­seau…) et des poli­tiques contem­po­rains, etc. Ce texte pour­rait bien deve­nir, si le mot n’était pas dis­cré­di­té, le bré­viaire d’un nou­veau « conser­va­tisme éclairé ».

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Découvrez 11 citations extraites du livre

Le progressisme, nous l'avons dit, n'est pas une option politique...

« En réa­li­té, le pro­gres­sisme, nous l’a­vons dit, n’est pas une option poli­tique, mais une neu­tra­li­sa­tion de la poli­tique. Il ne consiste pas à consi­dé­rer qu’un pro­grès est dési­rable — ce qui est une tau­to­lo­gie, mais à consi­dé­rer que tout mou­ve­ment est un pro­grès. De ce point de vue, la seule maxime qui reste à la poli­tique est l’in­jonc­tion de tout faire pour libé­rer le mou­ve­ment, pour défaire les immo­bi­lismes, pour décons­truire les bar­rières, pour lais­ser faire et lais­ser pas­ser”. La poli­tique est conduite par là à s’ef­fa­cer pour que plus rien ne puisse empê­cher la cir­cu­la­tion uni­ver­selle des per­sonnes et des choses, orches­trée par l’é­co­no­mie mar­chande. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

Ainsi la publicité vide de leur sens...

« Ain­si la publi­ci­té vide de leur sens les mots les plus essen­tiels, et rend absurde le lan­gage. Der­rière elle, le mar­ché tra­hit des réa­li­tés qu’il absorbe : rendre tout bien échan­geable et liquide, c’est à la fin détruire ce qui ne sau­rait deve­nir l’ob­jet d’un échange mar­chand. La mobi­li­sa­tion géné­rale qui consti­tue la dyna­mique du mar­ché, cette exten­sion per­pé­tuelle pour ne rien lais­ser en dehors de la marche de l’é­co­no­mie, c’est, au sens lit­té­ral du terme, une liqui­da­tion géné­rale. Vendre de la pré­sence”, c’est seule­ment révé­ler et emmu­rer encore notre infi­nie soli­tude ; com­mer­cia­li­ser l’hu­main, c’est de toute évi­dence contri­buer à construire un monde inhu­main. Si elle va au bout de ce ren­ver­se­ment uni­ver­sel, la socié­té la plus pros­père peut aus­si bien deve­nir celle la plus grande misère… Cette misère n’a rien d’une fata­li­té : elle est un choix, le pro­duit d’une vision du monde. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

La technologie contemporaine...

« La tech­no­lo­gie contem­po­raine entre en lutte contre le réel, parce qu’il est consti­tué de consis­tances qui sont autant de pesan­teurs pour notre exi­gence de mobi­li­té. La vie implique pour­tant de les assu­mer — et si nous pré­fé­rons les fuir, seule la mort pour­rait nous offrir la pers­pec­tive d’une absence de contra­rié­tés. Vivre et habi­ter ce monde, exis­ter et être un corps, sup­pose d’ac­cep­ter un ordre de contraintes, une infi­ni­té de renon­ce­ments. Se trou­ver vrai­ment quelque part, c’est à chaque ins­tant de cette pré­sence renon­cer à être ailleurs. Faire vrai­ment quelque chose, c’est ne pas faire tout le reste. Voi­là ce à quoi nous ne vou­lons plus nous résoudre. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

Ce qui est en jeu...

« Ce qui est en jeu, ce n’est pas d’ar­rê­ter le mou­ve­ment ; c’est au contraire de sau­ver la pos­si­bi­li­té d’un mou­ve­ment authen­tique. Pour qu’un chan­ge­ment effec­tif nous approche du meilleur, encore faut-il un point d’ap­pui : Don­nez-moi, deman­dait Archi­mède, un point fixe et un levier, et je sou­lè­ve­rai la terre.” Si l’on nous refuse tout point fixe, nos leviers même les plus puis­sants ne nous ser­vi­ront à rien… En affir­mant que tout est mobile, on tue en fait le mou­ve­ment. Le pro­gres­sisme a détruit l’i­dée de pro­grès en décri­vant le chan­ge­ment comme néces­saire par prin­cipe. Il faut sau­ver de cette illu­sion absurde les pro­grès véri­tables dont nous avons besoin : et voi­là com­ment nous pour­rons remettre la main sur notre propre destin. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

La conscience humaine ne vise à rien de moins que l'éternité...

« La conscience humaine ne vise à rien de moins que l’é­ter­ni­té. Et c’est pré­ci­sé­ment ce que pro­fesse la phi­lo­so­phie nais­sante face à la sophis­tique : quand l’in­tel­li­gence n’a d’autre but que de chan­ger aus­si vite que les ombres qui passent, elle devient incon­sis­tante comme elles et tout aus­si infé­conde. De la même manière, quand le pro­gres­sisme moderne s’e­nor­gueillit d’être l’art d’é­pou­ser au mieux le mou­ve­ment, quand il consi­dère par prin­cipe qu’il faut chan­ger, bou­ger, évo­luer, alors il détruit la pos­si­bi­li­té de tout pro­grès authentique. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

La science elle-même se déploie dans le temps...

« La science elle-même se déploie dans le temps, bien sûr : elle découvre peu à peu de nou­velles connais­sances, de nou­velles véri­tés, qui ajustent l’une après l’autre notre repré­sen­ta­tion du réel. Mais si la science a une his­toire, c’est celle d’un mou­ve­ment vers cette véri­té qui n’en a pas, et dont la néces­si­té est étran­gère à nos décou­vertes. L’his­toire des sciences a un sens, parce que les sciences s’ap­prochent peu à peu dans le temps de ce qui est exté­rieur au temps. Et on peut par­ler de ce che­mi­ne­ment de la science comme d’un pro­grès, si l’on consi­dère ce che­mi­ne­ment par rap­port à l’ob­jec­tif immuable que consti­tue la véri­té, vers laquelle tout cher­cheur tente sim­ple­ment d’avancer.
On ne peut donc par­ler de pro­grès que pour décrire un mou­ve­ment qui se connaît pour but un point d’ar­ri­vée immobile. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

L'avenir n'existe pas...

« L’a­ve­nir n’existe pas. Il n’existe abso­lu­ment pas. Cette repré­sen­ta­tion men­tale du temps comme une flèche est un piège intel­lec­tuel ; elle nie la consis­tance du pré­sent en le rédui­sant à n’être que le point de pas­sage vers un ave­nir déjà défi­ni. Or cette flèche est une fic­tion, et l’a­ve­nir n’est pas écrit. Seuls existent le pré­sent, et le pas­sé qui se condense en lui. Le non-encore être” est encore du non-être ; et même le pos­sible doit être créé. En réa­li­té, notre ave­nir ne sera rien d’autre que le résul­tat de nos choix. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

Le transhumanisme se donne un but totalement autre...

« Le trans­hu­ma­nisme se donne un but tota­le­ment autre : non pas répa­rer le corps humain, mais le rem­pla­cer. Il ne s’a­git plus de se mode­ler sur une régu­la­ri­té natu­relle, que l’on appelle la san­té — l’é­tat du corps dans son cours ordi­naire, quand aucune patho­lo­gie n’est venue le trou­bler. Le pro­gres­sisme post-moderne ne veut pas rece­voir l’homme tel qu’il est, mais le dépas­ser — pour cela, il faut com­men­cer par le mépri­ser, et par se mépri­ser soi-même. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

Notre optimisme est un nihilisme...

« Notre opti­misme est un nihi­lisme : il décrète que ce monde ne vaut rien, puisque tout autre monde sera meilleur. Il n’y a pas d’hé­si­ta­tion à avoir, d’in­cer­ti­tude pos­sible sur le sens de l’his­toire : il faut choi­sir le chan­ge­ment par par­ti pris, parce qu’il va arri­ver et parce qu’il doit arri­ver. Une telle pers­pec­tive refuse de consi­dé­rer que nous ayons des biens qu’il fau­drait prendre en compte dans un choix, un dis­cer­ne­ment à mener ; c’est donc sup­po­ser que nous n’a­vons rien à perdre — c’est sup­po­ser que nous n’a­vons rien du tout, en réa­li­té. C’est rame­ner tout l’être au néant, en ne don­nant de cré­dit qu’à ce qui n’est pas encore. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

Affirmer que ce qui existe doit exister...

« Affir­mer que ce qui existe doit exis­ter, c’est évi­dem­ment une erreur de rai­son­ne­ment ; mais le contraire d’une erreur n’est pas for­cé­ment une véri­té : et en l’oc­cur­rence, affir­mer de manière oppo­sée que ce qui existe doit être rem­pla­cé, que l’in­no­va­tion est for­cé­ment un bien — regar­der l’his­toire comme étant for­cé­ment l’oc­ca­sion d’un pro­grès, c’est aus­si une erreur de rai­son­ne­ment, non moins absurde, et non moins dangereuse. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

La modernité est l'univers...

« La moder­ni­té est l’u­ni­vers dans lequel le mou­ve­ment prend toute la place, à la fois comme un fait et comme une norme. Le mou­ve­ment est tout ce qui est, et tout ce qui doit être. Mal­heur à celui qui n’est pas assez mobile, pas assez souple et adap­table, pour se cou­ler dans le flux : il consti­tue une objec­tion vivante à ce monde nou­veau, à ce monde du nou­veau, qui ne lui par­don­ne­ra pas de res­ter comme un fos­sile encom­brant au milieu de l’in­no­va­tion triom­phante. La moder­ni­té se carac­té­rise par une immense colère contre ce qui ne se met pas à son rythme. »

Fran­çois-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échap­per à l’ère du mou­ve­ment per­pé­tuel, Édi­tions Gras­set, 2018

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