« Jamais la nouvelle classe discutante représentée par les couches moyennes instruites en pleine ascension sociale n’aura manifesté un tel mépris ni un tel sentiment de supériorité à l’égard de la ruralité et des types humains qui la peuplaient. Jamais la nécessité de venir à bout d’un milieu culturel jugé “complètement déliquescent” et marqué au coin de l’obscurantisme n’aura été formulé de façon aussi péremptoire et aussi provocante qu’au cours de ces années soixante où la révolution consumériste fit un grand usage d’hyperboles pour vanter les mérites d’un progrès à la fois illimité et mirifique. Il devait être entendu, une fois pour toutes, que ce monde révolu n’avait plus sa place, ni comme paysage ni comme humanité, et qu’il fallait en finir au plus vite avec ce que Pier Paolo Pasolini avait nommé “le temps des lucioles”, ces petites lumières des campagnes susceptibles d’éclairer la vie. »
Patrick Buisson
La fin d’un monde, éditions Albin Michel, 2021