« Ces quelques jours dans la Mongolie des prairies m’apprennent que la solitude m’est devenue un état nécessaire. Je la trouve douce. Elle est la sueur de la liberté. »
Sylvain Tesson
L’axe du loup, éditions Robert Laffont, 2004
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« Ces quelques jours dans la Mongolie des prairies m’apprennent que la solitude m’est devenue un état nécessaire. Je la trouve douce. Elle est la sueur de la liberté. »
Sylvain Tesson
L’axe du loup, éditions Robert Laffont, 2004
« J’avais oublié combien le vélo aliénait l’esprit. À bicyclette, toute l’énergie spirituelle est consacrée à maintenir la tension physique. Et ce qu’on gagne en vitesse est à mettre au débit de la production intellectuelle. Le corps travaille, le cerveau dort. »
Sylvain Tesson
L’axe du loup, éditions Robert Laffont, 2004
« Nous avons connu, nous avons touché un monde, (enfants nous en avons participé), où un homme qui se bornait dans la pauvreté était au moins garanti dans la pauvreté. C’était une sorte de contrat sourd entre l’homme et le sort, et à ce contrat le sort n’avait jamais manqué avant l’inauguration des temps modernes. Il était entendu que celui qui faisait de la fantaisie, de l’arbitraire, que celui qui introduisait un jeu, que celui qui voulait s’évader de la pauvreté risquait tout. Puisqu’il introduisait le jeu, il pouvait perdre. Mais celui qui ne jouait pas ne pouvait pas perdre. Ils ne pouvaient pas soupçonner qu’un temps venait, et qu’il était déjà là, et c’est précisément le temps moderne, où celui qui ne jouerait pas perdrait tout le temps, et encore plus sûrement que celui qui joue. »
Charles Péguy
L’Argent, Les Cahiers de la Quinzaine, 1913, Éditions des Équateurs, coll. Parallèles, 2008
« Et ce bonheur, ce climat de bonheur. Évidemment on ne vivait point encore dans l’égalité. On n’y pensait même pas, à l’égalité, j’entends à une égalité sociale. Une inégalité commune, communément acceptée, une inégalité générale, un ordre, une hiérarchie qui paraissait naturelle ne faisait qu’étager les différents niveaux d’un commun bonheur. On ne parle aujourd’hui que de l’égalité. Et nous vivons dans la plus monstrueuse inégalité économique que l’on n’ait jamais vue dans l’histoire du monde. On vivait alors. On avait des enfants. Ils n’avaient aucunement cette impression que nous avons d’être au bagne. Ils n’avaient pas comme nous cette impression d’un étranglement économique, d’un collier de fer qui tient à la gorge et qui se serre tous les jours d’un cran. Ils n’avaient point inventé cet admirable mécanisme de la grève moderne à jet continu, qui fait toujours monter les salaires d’un tiers, et le prix de la vie d’une bonne moitié, et la misère, de la différence. »
Charles Péguy
L’Argent, Les Cahiers de la Quinzaine, 1913, Éditions des Équateurs, coll. Parallèles, 2008
« Que reste-t-il aujourd’hui de tout cela ? Comment a‑t-on fait, du peuple le plus laborieux de la terre, et peut-être du seul peuple laborieux de la terre, du seul peuple peut-être qui aimait le travail pour le travail, et pour l’honneur, et pour travailler, ce peuple de saboteurs, comment a‑t-on pu en faire ce peuple qui sur un chantier met toute son étude à ne pas en fiche un coup. Ce sera dans l’histoire une des plus grandes victoires, et sans doute la seule, de la démagogie bourgeoise intellectuelle. Mais il faut avouer qu’elle compte. Cette victoire. »
Charles Péguy
L’Argent, Les Cahiers de la Quinzaine, 1913, Éditions des Équateurs, coll. Parallèles, 2008
« Le croira-t-on, nous avons été nourris dans un peuple gai. Dans ce temps-là un chantier était un lieu de la terre où des hommes étaient heureux. Aujourd’hui un chantier est un lieu de la terre où des hommes récriminent, s’en veulent, se battent ; se tuent.
De mon temps tout le monde chantait. (Excepté moi, mais j’étais déjà indigne d’être de ce temps-là.) Dans la plupart des corps de métiers on chantait. Aujourd’hui on renâcle. Dans ce temps-là on ne gagnait pour ainsi dire rien. Les salaires étaient d’une bassesse dont on n’a pas idée. Et pourtant tout le monde bouffait. Il y avait dans les plus humbles maisons une sorte d’aisance dont on a perdu le souvenir. Au fond on ne comptait pas. Et on n’avait pas à compter. Et on pouvait élever des enfants. Et on en élevait. Il n’y avait pas cette espèce d’affreuse strangulation économique qui à présent d’année en année nous donne un tour de plus. On ne gagnait rien ; on ne dépensait rien ; et tout le monde vivait. »
Charles Péguy
L’Argent, Les Cahiers de la Quinzaine, 1913, Éditions des Équateurs, coll. Parallèles, 2008
« La Femme, matelot, c’est le temple de l’humanité. C’est dans son ventre qu’un grain de ta semence, que tu ne verrais pas seulement à l’œil nu, même avec une lunette marine, se transforme en un être vivant, comme toi, qui sera un autre toi-même… Un temple comme ça, matelot, tu ne le profanes pas !… Ou alors tu deviens moins qu’une bête. »
Henri Vincenot
L’œuvre de chair, éditions Denoël, 1984
« On devrait pouvoir se contenter du monde et non pas rêver à des paradis inaccessibles et à des vies éternelles. Sous Homère, les révélations monothéistes n’avaient pas encore inoculé aux hommes l’espérance de fumeuses promesses. »
Sylvain Tesson
Un été avec Homère, éditions des Équateurs, 2018
« Les héros de ces chants vivent encore en nous. Leur courage nous fascine. Leurs passions nous sont familières. Leurs aventures ont forgé des expressions que nous employons. Ils sont nos frères et sœurs évaporés : Athéna, Achille, Ajax, Hector, Ulysse et Hélène ! Leurs épopées ont engendré ce que nous sommes, nous autres Européens : ce que nous sentons, ce que nous pensons. “Les Grecs ont civilisé le monde”, écrivait Chateaubriand. Homère continue à nous aider à vivre. »
Sylvain Tesson
Un été avec Homère, éditions des Équateurs, 2018