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Auteur

Sylvain Tesson

Sylvain Tesson, né le 26 avril 1972 à Paris, est un écrivain voyageur français. Géographe de formation, il choisit très jeune de faire des voyages et des expéditions dans des conditions souvent extrêmes (traversées de continents à vélo ou à pied) dont il rapporte des carnets ou des films. Auteur de récits de voyage et de livres de réflexion, il est lauréat de nombreux prix littéraires dont le prix Goncourt de la nouvelle en 2009 et le prix Renaudot en 2019.

Découvrez 102 citations de Sylvain Tesson

Qu’est-ce que la solitude ?…

« Qu’est-ce que la soli­tude ? Une com­pagne qui sert à tout.
Elle est un baume appli­qué sur les bles­sures. Elle fait caisse de réso­nance : les impres­sions sont décu­plées quand on est seul à les faire sur­gir. Elle impose une res­pon­sa­bi­li­té : je suis l’am­bas­sa­deur du genre humain dans la forêt vide d’hommes. Je dois jouir de ce spec­tacle pour ceux qui en sont pri­vés. Elle génère des pen­sées puisque la seule conver­sa­tion pos­sible se tient en soi-même. Elle lave de tous les bavar­dages, per­met le coup de sonde en soi. Elle convoque à la mémoire le sou­ve­nir des gens aimés. Elle lie l’er­mite d’a­mi­tié avec les plantes et les bêtes et par­fois un petit dieu qui pas­se­rait par là. »

Syl­vain Tesson
Dans les forêts de Sibé­rie, édi­tions Gal­li­mard, 2011

Je crois à la mémoire des pierres…

« Je crois à la mémoire des pierres. Elles absorbent l’écho des conver­sa­tions, des pen­sées. Elles incor­porent l’odeur des hommes. Les pierres sau­vages des grottes et les pierres sages des églises rayonnent d’une force man­tique. On est tou­jours sai­si quand on pénètre sous une voûte de pierre qui a abri­té les hommes. »

Syl­vain Tesson
Une très légère oscil­la­tion, jour­nal 2014 – 2017, édi­tions des Équa­teurs, 2017, p. 115

Le luxe n’est pas un état…

« La tem­pé­ra­ture chute subi­te­ment ? J’a­bats du bois par ‑35° et lorsque je rentre dans la cabane, la cha­leur pro­cure l’ef­fet d’un luxe suprême. Après la froi­dure, le bruit d’un bou­chon de vod­ka qui saute près d’un poêle sus­cite infi­ni­ment plus de jouis­sance qu’un séjour pala­tial au bord du grand canal véni­tien. Que les huttes puissent tenir rang de palais, les habi­tués des suites royales ne le com­pren­dront jamais. Ils n’ont pas connu l’on­glet avant le bain mous­sant. Le luxe n’est pas un état mais le pas­sage d’une ligne, le seuil où, sou­dain, dis­pa­raît toute souf­france. »

Syl­vain Tesson
Dans les forêts de Sibé­rie, édi­tions Gal­li­mard, 2011

Le journal est la bouée de sauvetage…

« Le jour­nal est la bouée de sau­ve­tage dans l’océan de ces erre­ments. On le retrouve au soir venu. On s’y tient. On s’y plonge pour oublier les tré­pi­da­tions, on y confie une pen­sée, le sou­ve­nir d’une ren­contre, l’émotion pro­cu­rée par un beau pay­sage ou, mieux, par un visage, ce pay­sage de l’âme. On y note une phrase, une colère, un enthou­siasme, l’éblouissement d’une lec­ture. Chaque soir on y revient. On lui voue sa fidé­li­té. La seule qui vaille. La seule qui tienne. Le jour­nal est une patrie.
Grâce à lui, le sis­mo­graphe inté­rieur se calme. Les affo­le­ments du métro­nome vital qui explo­rait le spectre à grands coups pani­qués se réduisent alors à une très légère oscillation. »

Syl­vain Tesson
Une très légère oscil­la­tion, jour­nal 2014 – 2017, édi­tions des Équa­teurs, 2017, p. 12

Le feu me tient compagnie…

« …Le feu me tient com­pa­gnie. C’est un cher petit ami que je peux faire jaillir de mes doigts chaque jour, un petit dieu bien vivant qui réchauffe l’âme, les sau­cisses et les mains. J’aime lire de la poé­sie à mon petit feu. »

Syl­vain Tesson
L’axe du loup, édi­tions Robert Laf­font, 2004

Le sentiment de ne plus habiter le vaisseau terrestre…

« Le sen­ti­ment de ne plus habi­ter le vais­seau ter­restre avec la même grâce pro­ve­nait d’une tré­pi­da­tion géné­rale fon­dée sur l’ac­crois­se­ment. Il y avait trop de tout, sou­dain. Trop de pro­duc­tion, trop de mou­ve­ment, trop d’énergies.
Dans un cer­veau, cela pro­vo­quait l’épilepsie.
Dans l’His­toire, cela s’ap­pe­lait la massification.
Dans une socié­té, cela menait à la crise. »

Syl­vain Tesson
Sur les che­mins noirs, 2016, édi­tions Gal­li­mard, coll. Folio, 2019

Et si nos malheurs venaient…

« Et si nos mal­heurs venaient de ce que nous vivons à trop grande échelle ? La terre se glo­ba­lise, les fron­tières se dis­solvent, les mar­chan­dises cir­culent. J’ai la subite envie de m’in­ven­ter une vie au 125000. C’é­tait le rêve des anar­chistes, des com­mu­nards et des Grecs qui lisaient Xéno­phon : réduire l’es­pace de notre agi­ta­tion, se replier dans un domaine, ne vou­loir atteindre que ce qui est acces­sible. Accueillir des pen­sées uni­ver­selles en culti­vant un lopin. Ne côtoyer que les gens que l’on peut aller visi­ter à pied. Ne man­ger que les pro­duits de sa propre région, en bref, vivre sur les che­mins noirs, ces sentes secrètes qui strient les feuilles de l’I­GN, échap­pant au contrôle de l’É­tat. Il est urgent de chan­ger d’échelle. »

Syl­vain Tesson
Une très légère oscil­la­tion, jour­nal 2014 – 2017, Édi­tions des Équa­teurs, 2017

Si nous étions malheureux, mourant de faim et de froid…

« Bour­gogne n’é­tait pas en reste dans l’af­fec­tion au chef, mais autour d’une page, il livrait une autre clé : Si nous étions mal­heu­reux, mou­rant de faim et de froid, il nous res­tait encore quelque chose qui nous sou­te­nait : l’hon­neur et le cou­rage.” L’hon­neur et le cou­rage ! Comme ils réson­naient étran­ge­ment, ces mots, deux cents années plus tard. Étaient-ils encore en vie, ces mots, dans ce monde que nous tra­ver­sions pleins phares ? Nous fîmes une courte halte sur le bas-côté, il nei­geait, la nuit sem­blait en larmes dans le fais­ceau des phares. Dieux, me disais-je, en pis­sant dans le noir, nous autres, pauvres gar­çons du XXIème siècle, ne sommes-nous pas des nains ? Alan­guis dans la man­grove du confort, pou­vions-nous com­prendre ces spectres de 1812 ? »

Syl­vain Tesson
Bere­zi­na, édi­tions Gué­rin, 2015, 978−2−35221−089−4, p. 103

Qu’est-ce qui s’était passé pour qu’un peuple…

« Qu’est-ce qui s’é­tait pas­sé pour qu’un peuple devînt un agré­gat d’in­di­vi­dus per­sua­dés de n’a­voir rien à par­ta­ger les uns avec les autres ? Le shop­ping, peut-être ? Les mar­chands avaient réus­si leur coup. Pour beau­coup d’entre nous, ache­ter des choses était deve­nu une acti­vi­té prin­ci­pale, un hori­zon, une des­ti­née. La paix, la pros­pé­ri­té, la domes­ti­ca­tion nous avaient don­né l’oc­ca­sion de nous replier sur nous-même. Nous culti­vions nos jar­dins. Cela valait sans doute mieux que d’en­grais­ser les champs de bataille. »

Syl­vain Tesson
Bere­zi­na, édi­tions Gué­rin, 2015, 978−2−35221−089−4, p. 194

Dans les nuits d’angoisse…

« Dans les nuits d’angoisse, jamais les livres ne m’ont à ce point sem­blé des com­pa­gnons. Sans eux, serais-je debout ? Étrange sen­sa­tion d’entendre les élites poli­tiques se van­ter de ne plus jamais lire (la cyber girl Fleur Pel­le­rin, par exemple) et pro­mettre avec enthou­siasme, l’avènement de géné­ra­tions ultra-connec­tées. »

Syl­vain Tesson
Une très légère oscil­la­tion, jour­nal 2014 – 2017, Édi­tions des Équa­teurs, 2017

Un haut lieu…

« Un haut lieu, dit-il, c’est un arpent de géo­gra­phie fécon­dé par les larmes de l’His­toire, un mor­ceau de ter­ri­toire sacra­li­sé par un geste, mau­dit par une tra­gé­die, un ter­rain qui, par-delà les siècles, conti­nue d’ir­ra­dier l’é­cho des souf­frances tues ou des gloires pas­sées. C’est un pay­sage béni par les larmes et le sang. Tu te tiens devant et, sou­dain, tu éprouves une pré­sence, un sur­gis­se­ment, la mani­fes­ta­tion d’un je-ne-sais-quoi. C’est l’é­cho de l’His­toire, le rayon­ne­ment fos­sile d’un évé­ne­ment qui sourd du sol, comme une onde. Ici, il y a eu une telle inten­si­té de tra­gé­die en un si court épi­sode de temps que la géo­gra­phie ne s’en est pas remise. Les arbres ont repous­sé, mais la Terre, elle, conti­nue de souf­frir. Quand elle boit trop de sang, elle devient un haut lieu. Alors, il faut la regar­der en silence car les fan­tômes la hantent. »

Syl­vain Tesson
Bere­zi­na, édi­tions Gué­rin, 2015, 978−2−35221−089−4, p. 115

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