« Je n’ai pas cru que tes lois pussent l’emporter sur les lois non écrites et immuables des dieux. »
Sophocle
Antigone, 441 av. notre ère
Un projet de l'Institut ILIADE pour la longue mémoire européenne
« Je n’ai pas cru que tes lois pussent l’emporter sur les lois non écrites et immuables des dieux. »
Sophocle
Antigone, 441 av. notre ère
« L’essentiel d’un destin que résuma aux Thermopyles l’épitaphe de Simonide : obéir à une loi. Il est admis en Grèce que Lacédémone représente par excellence cette chose toute grecque, ignorée du reste du monde oriental et qui fonde non seulement la cité, mais la science et la philosophie : le règne de la loi, et, plus encore, l’héroïsation de la loi. La loi oppose un être abstrait, rationnel et fixe à la domination personnelle et arbitraire d’un homme. C’est ce que dans Hérodote Démarate apprend à Xerxès : « La loi est pour eux un maître absolu ; ils la redoutent beaucoup plus que tes sujets ne te craignent. Ils obéissent à ses ordres, et ses ordres, toujours les mêmes, leur défendent la fuite. » Cette figure vivante de la loi qu’on aperçoit au pied du Taygète donne à Sparte, dans l’hellénisme religieux et calme du temps des guerres médiques, une prestige, une autorité, un primat analogues à ceux que reçoivent Delphes de la Pythie, et Olympie de l’Altis. Être soumis à la loi c’est durer par elle, selon elle, et Sparte c’est la chose qui dure.
Thucydide attribue le secret de sa puissance à ce fait que depuis quatre cent ans elle est régie par la même constitution. Représentants de la loi les Spartiates sont pourtant les ennemis de la tyrannie, et c’est en intervenant dans les villes contre les tyrans qu’ils s’habituent à intervenir dans les affaires des cités. Seuls d’ailleurs parmi les Grecs ils ont conservé l’ancienne royauté homérique, en la divisant pour lui enlever sa force d’agression intérieure et de tyrannie. Toutes les magistratures, héréditaires ou collectives restant collégiales, l’un réside vraiment dans la loi, et dans la loi seule. »
Albert Thibaudet
La campagne avec Thucydide, 1922
« Car, qu’est-ce que la liberté ? C’est avoir la volonté de répondre de soi. C’est maintenir les distances qui nous séparent. C’est être indifférent aux chagrins, aux duretés, aux privations, à la vie même. C’est être prêt à sacrifier les hommes à sa cause, sans faire exception de soi-même. Liberté signifie que les instincts virils, les instincts joyeux de guerre et de victoire, prédominent sur tous les autres instincts, par exemple sur ceux du « bonheur ». L’homme devenu libre, combien plus encore l’esprit devenu libre, foule aux pieds cette sorte de bien-être méprisable dont rêvent les épiciers, les chrétiens, les vaches, les femmes, les Anglais et d’autres démocrates. L’homme libre est guerrier. — À quoi se mesure la liberté chez les individus comme chez les peuples ? À la résistance qu’il faut surmonter, à la peine qu’il en coûte pour arriver en haut. Le type le plus élevé de l’homme libre doit être cherché là, où constamment la plus forte résistance doit être vaincue : à cinq pas de la tyrannie, au seuil même du danger de la servitude. »
Friedrich Nietzsche
Crépuscule des idoles ou Comment on philosophe avec un marteau (Götzen-Dämmerung oder wie man mit dem Hammer philosophiert), 1888, trad. Patrick Wotling, éditions Garnier-Flammarion, 2005
« Le Rebelle a pour devise hic et nunc, car il est l’homme des coups de main, libre et indépendant. Nous avons vu que nous ne pouvons comprendre sous ce type humain qu’une fraction des masses ; et pourtant, c’est ici que se forme la petite élite, capable de résister à l’automatisme, qui tiendra en échec le déploiement de la force brute. C’est la liberté ancienne, vêtue à la mode du temps : la liberté substantielle, élémentaire, qui se réveille au cœur des peuples quand la tyrannie des partis ou des conquérants étrangers pèse sur leurs pays. Il ne s’agit pas d’une liberté qui proteste ou émigre, mais d’une liberté qui décide d’engager la lutte.
C’est une distinction qui agit sur la sphère des croyances. Le Rebelle ne peut se permettre l’indifférence, signe d’une époque révolue, au même titre que la neutralité des petits États ou la détention en forteresse pour délit politique. Le recours aux forêts mène à de graves décisions. Le Rebelle a pour tâche de fixer la mesure de liberté qui vaudra dans des temps à venir, en dépit de Léviathan. Adversaire dont il n’entamera pas le pouvoir à coups de concepts.
La résistance du Rebelle est absolue : elle ne connaît pas de neutralité, ni de grâce ni de détention en forteresse. Il ne s’attend pas à ce que l’ennemi se montre sensible aux arguments, encore moins à ce qu’il s’astreigne à des règles chevaleresques. Il sait aussi qu’en ce qui le concerne, la peine de mort n’est pas supprimée. Le Rebelle connaît une solitude nouvelle, telle que l’implique avant tout l’épanouissement satanique de la cruauté – son alliance avec la science et le machinisme, qui fait apparaître dans l’histoire, non pas un élément nouveau, mais des manifestations nouvelles. »
Ernst Jünger
Traité du rebelle ou le recours aux forêts (Der Waldgang), 1951, trad. Henri Plard, Christian Bourgois éditeur, 1995
« L’ordre, et l’ordre seul, fait en définitive la liberté. Le désordre fait la servitude. »
Charles Péguy
Notre patrie, Les Cahiers de la Quinzaine, VII‑3, 1905, in Œuvres en prose complètes, Tome II, éditions Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1988
« Il ne s’agit pas de le nier, cet autre. C’est à lui que nous devons d’exister en tant que communauté singulière, en tant que non-autre, selon l’arithmétique de l’identité, qui procède par discrimination et retranchement, mais de constater que lui seul a désormais droit de cité. Il a pris toute la place. C’est la seule parole autorisée. Assorti d’une majuscule, l’Autre est devenu, sous les espèces de l’idéologie des droits de l’homme et de l’antiracisme, une logomachie d’autant plus tyrannique qu’elle est philosophiquement inconsistante. »
François Bousquet
L’idéologie Big Other, les autres avant les nôtres, allocution au troisième colloque de l’Institut Iliade, Paris, Maison de la Chimie, 9 avril 2016.
« Désormais, il n’y a plus dans la communauté que des automates manœuvrés d’en haut, des résidus infiniment petits de l’homme, des âmes mutilées, passives et pour ainsi, mortes. Institué pour préserver les personnes, l’État les a toutes anéanties. Institué pour préserver les propriétés, l’État les confisque toutes. »
Hippolyte Taine
Les origines de la France contemporaine, III – Le régime moderne, 1890
« S’il y a jamais eu une civilisation d’esclaves dans les grandes largeurs, c’est bien la civilisation moderne. Aucune culture traditionnelle n’a vu d’aussi grandes masses condamnées à un travail aveugle, automatique et sans âme : esclavage qui n’a même pas pour contrepartie la haute stature et la réalité tangible de figures de seigneurs et de dominateurs, mais est imposé de façon anodine à travers la tyrannie du facteur économique et des structures d’une société plus ou moins collectivisée. »
Julius Evola
Révolte contre le monde moderne (Rivolta contro il mondo moderno), 1934
« L’homme moderne, l’homme de la technique, obsédé par son efficience, les objectifs à atteindre, n’a pour univers mental que ce qui est subordonné à cette efficacité. Beauté, sagesse, poésie, sont subalternes, à moins d’être monnayables. La tyrannie de l’efficience débouche sur l’invivable, sur une nouvelle barbarie sans la santé des barbares : la ville qui n’est pas une ville, la domination de l’argent, le saccage de la nature et la manipulation du vivant. À force de calculer, l’homme rencontre l’incalculable. »
Dominique Venner
Histoire et tradition des Européens, Éditions du Rocher, coll. Histoire, 2002
« Le régime dans lequel nous vivons, nonobstant les parures dont il s’affuble, est celui d’une démocratie dissociée de la souveraineté du peuple. Une démocratie purement formelle confisquée par une oligarchie. »
Patrick Buisson
La Cause du peuple, éditions Perrin, 2016