« Araignée plantée au centre de la pensée française, il l’avait si bien étoilée de fils transparents et subtils que c’est tout juste si elle respirait encore. »
Jean Raspail
Le Camp des saints, éditions Robert Laffont, 1973
Un projet de l'Institut ILIADE pour la longue mémoire européenne
Nous menons un travail long et exigeant afin d'assurer la qualité des milliers de citations que nous vous proposons. Tout cela a un coût que vous pouvez nous aider à supporter en faisant un don.
« Araignée plantée au centre de la pensée française, il l’avait si bien étoilée de fils transparents et subtils que c’est tout juste si elle respirait encore. »
Jean Raspail
Le Camp des saints, éditions Robert Laffont, 1973
« Une vague est morte sur nos rives matérielles. Sans bruit, sans force, car elle venait de très loin. Je l’ai prise dans le creux de ma main. Puis elle m’a échappé et il n’en restait rien. »
Jean Raspail
Pêcheur de lunes. Qui se souvient des hommes…, éditions Robert Laffont, 1990
« Dans les Andes, on ne compte pas quatre éléments, mais cinq : l’air diaphane, l’eau insondable des lacs, le feu des volcans, la terre qui tremble, et le silence. Un silence de sépulcre, d’ordre divin, que seule trouble la voix des esprits en soulevant des trombes de poussière qui emportent l’âme des humains : le vent. L’homme écoute le vent, dans les Andes, comme la voix de son créateur. Confondu dans sa petitesse, relégué à l’état d’épisode, conscient de son impuissance, il s’est cherché des alliés dans l’au-delà. Soleil, lune, lacs, montagnes, cascades, rivières, rocs et vents, glaciers, et toutes les forces de la nature, tout est déifié. »
Jean Raspail
Pêcheur de lunes. Qui se souvient des hommes…, éditions Robert Laffont, 1990
« Quelle était donc cette faim qui tenaillait le vieillard ? Quelle faim morale lui crispait l’âme sans qu’il pût la traduire autrement qu’en termes de gibier disparu et de jeunes gens déserteurs ? Je crois que je la connaissais. Je l’avais déjà rencontrée. Sans doute la faim de ce qui fut, de ce qui ne sera plus, la silencieuse et invisible famine qui conduit les peuples perdus à la mort plus sûrement encore que la vraie faim du corps. »
Jean Raspail
Pêcheur de lunes. Qui se souvient des hommes…, éditions Robert Laffont, 1990
« Qu’on m’entende bien : ils ne sont pas morts. Sans doute même bien plus nombreux qu’avant, transplantés dans une ville ou une autre, confondus, brassés, mêlés à la grande foule anonyme, ignorante du passé et de l’avenir, petits hommes semblables qui ont rejoint la ronde. Avec, peut-être, parmi eux, un prolétaire basané qui tripote, pensif, dans son bidonville, une hache de pierre polie, souvenir de son village, et qui sait encore qui il est : celui-là demeure un seigneur… »
Jean Raspail
Pêcheur de lunes. Qui se souvient des hommes…, éditions Robert Laffont, 1990
« Un hélicoptère de l’Associated Press la survola à vingt reprises à différentes altitudes, hérissé de téléobjectifs et de grands angulaires. Parmi les photos qui furent publiées dans la presse du monde entier, certaines étaient proprement bouleversantes, exactement aptes à émouvoir les âmes sensibles sans trop les effrayer. »
Jean Raspail
Le Camp des saints, éditions Robert Laffont, 1973
« On a bien trop endormi la population pour qu’elle possède encore la force d’imaginer d’autres formes de guerre que celles que l’on commémore bêtement chaque année. La guerre ? Le Français peut bien lire ce mot noir sur blanc et sur huit colonnes sans que cela lui fasse ni chaud ni froid, à moins d’avoir vu l’ennemi, entendu le canon ou touché sa carte d’alimentation ! Tout ce que nous obtiendrions, c’est un rush des bonnes femmes sur le sucre, l’huile et le café, et un rush des morveux dans les rues du Quartier Latin. »
Jean Raspail
Le Camp des saints, éditions Robert Laffont, 1973
« Jour après jour, mois après mois, au fil de ses doutes, l’ordre devenait donc une forme de fascisme, l’enseignement une contrainte, le travail une aliénation, la révolution un sport gratuit, le loisir un privilège de classe, la marijuana un vulgaire tabac, la famille un étouffoir, la consommation une oppression, la réussite une maladie honteuse, le sexe un loisir sans conséquence, la jeunesse un tribunal permanent, la maturité une forme nouvelle de sénilité, la discipline une atteinte à la personnalité humaine, la religion chrétienne… et l’Occident… et la peau blanche… »
Jean Raspail
Le Camp des saints, éditions Robert Laffont, 1973
« Parmi ceux qui me liront, la plupart ne connaissent pas cette prière, mais certains s’en souviendront. Ce n’est pas une prière mièvre. Elle a le mérite d’être courte et d’en dire beaucoup en peu de mots, dans une langue claire. Mêlée au grondement du Talon, elle avait, si j’ose dire, de la gueule :
Seigneur Jésus, apprenez-nous,
À être généreux,
À vous servir comme vous le méritez,
À donner sans compter,
À combattre sans souci des blessures,
À nous dépenser sans attendre
D’autre récompense
Que celle de savoir
Que nous faisons votre sainte volonté.
C’est une prière de féodal adressée à son suzerain. On notera aussi le vouvoiement. Fermons la parenthèse. »
Jean Raspail
En canot sur les chemins d’eau du roi. Une aventure en Amérique, éditions Albin Michel, 2005
« Notre entreprise inspirait de l’intérêt, et aussi de la curiosité à l’égard du petit pavillon tricolore qui flottait à l’arrière de nos canots. Dans nombre de ces bourgades du bord de l’eau, en cet immédiat après-guerre, on n’avait jamais vu de “Français de France”, ni lorsque nous fûmes aux États-Unis, entendu parler leur langue. Nous représentions une sorte de préhistoire, ce qui fut et qui n’est plus : l’Amérique française. Nous étions quelque chose comme des explorateurs posthumes, des découvreurs d’un monde disparu venus l’espace d’un court moment réveiller de très anciens souvenirs et aussitôt les emportant avec eux dans le sillage de leurs canots. »
Jean Raspail
En canot sur les chemins d’eau du roi. Une aventure en Amérique, éditions Albin Michel, 2005
« On a connu des évêques-félons, des généraux-félons, des ministres-félons, des intellectuels-félons et des félons tout court. C’est une espèce d’homme dont l’Occident se fait de plus en plus prodigue au fur et à mesure qu’il se rétrécit. »
Jean Raspail
Le Camp des saints, éditions Robert Laffont, 1973
« On les appelait voyageurs, ou engagés du grand portage. Par les fleuves, les lacs, les rivières qui formaient une trame naturelle dans l’immensité nord-américaine, au XVIIe et XVIIIe siècles, convoyant à bord de leurs canots des explorateurs et des missionnaires, des marchands ou des officiers du roi, des soldats en tricorne gris des compagnies franches de la Marine, des pelleteries, des armes, des outils, renouvelant jour après jour, les mains crochées sur l’aviron, des exploits exténuants, ils donnèrent à la France un empire qui aurait pu la contenir sept fois. À chacun de leurs voyages, ils en repoussaient encore les frontières, vers le nord-ouest, vers l’ouest, vers le sud. »
Jean Raspail
En canot sur les chemins d’eau du roi. Une aventure en Amérique, éditions Albin Michel, 2005