« L’honneur est un luxe réservé à ceux qui ont des calèches. — Non. Il est la dernière richesse du pauvre. »
Albert Camus
Les Justes, 1950, éditions Gallimard, coll. Folio théâtre, 2008
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« L’honneur est un luxe réservé à ceux qui ont des calèches. — Non. Il est la dernière richesse du pauvre. »
Albert Camus
Les Justes, 1950, éditions Gallimard, coll. Folio théâtre, 2008
« “Mais l’honneur — l’honneur, monsieur !… L’honneur… ça c’est quelque chose qui existe — vraiment ! Et quel prix on peut trouver à la vie quand…” Il se mit debout avec une lourde impétuosité, un peu comme un bœuf tiré en sursaut de sa léthargie se dresserait brusquement sur ses pattes hors de son lit d’herbe… “Quand l’honneur est perdu — ah ça ! Par exemple — je ne peux donner une opinion — parce que — monsieur — je ne sais pas ce que c’est.” »
Joseph Conrad
Lord Jim, 1921, trad. Philippe Neel, éditions Gallimard, coll. Du monde entier, 1965
« Je suis content et fier d’y avoir été, même s’il a fallu payer le prix de la captivité, parce que là-haut… Ah ! Comment dire ?… Là-haut, on a eu des exemples, mon vieux. Des maîtres. Des patrons. Des capitaines ! Des hommes bien ! Je ne parle pas seulement du courage, ce qui est essentiel… Je parle aussi de la manière aussi, la manière !… […]
Oh je sais bien que ce n’est pas parce qu’on accepte de se faire tuer pour une cause que cette cause est juste. Mais je m’en fous de la cause… je vous parle des hommes… je pourrais vous donner la liste. De toutes les origines, de tous les rangs de l’armée. Il y en a je ne sais même pas leur nom. Je ne les ai vus qu’une fois. Je sens encore… leurs doigts sur mon cœur. Un seul type bien, vraiment bien, et ça change tout. Un seul ! Là-haut il y en avait plein ! Et ils avaient la manière. Je peux vous le dire… »
Pierre Schoendoerffer
Là-haut, Éditions Grasset, 1981
« La célèbre annonce parue dans la presse britannique au début du 20ème siècle, par laquelle l’explorateur polaire Shackleton cherche à recruter son équipage : “Hommes requis pour voyage périlleux, bas salaire, froid intense, longs mois de ténèbres, dangers constants, retour incertain. Honneur et célébrité en cas de succès.”, je connais tant de jeunes (et de moins jeunes) qui y répondraient tout de suite, Oui ! Mais qui aujourd’hui passerait cette annonce ? »
Jean-François Deniau
Histoires de courage, éditions Plon, 2000
« Pendant des années les cauchemars liés à l’évacuation de Talung ont rejoint ceux de la déportation. J’avais le sentiment d’avoir été parjure. Ce mot veut-il dire encore quelque chose à une époque où la notion d’honneur est passée à l’arrière-plan ? Disons qu’il ne s’agissait pas d’un serment chevaleresque. Tout simplement de centaines d’hommes et de femmes dont, parfois, les moindres traits sont inscrits dans ma mémoire et à qui, au nom de mon pays, j’avais demandé un engagement au péril de leur vie. Nous les avons abandonnés en deux heures. Nous avons pris la fuite comme des malfrats. Ils ont été assassinés à cause de nous.
Sachez-le, c’était un crime. »
Hélie Denoix de Saint Marc
Toute une vie, éditions les arènes, 2004
« Mais n’accusons pas les seuls bourgeois sous prétexte qu’ils ont bon dos : nous sommes tous dans le même train, tous résignés à faire des patiences avec un jeu de cartes sans figures — littéralement sans honneurs. Un peu de progrès encore, et nous ne nous soucierons même plus d’avoir des cœurs rouges et des piques noirs. Des couleurs incolores ? Pourquoi pas ? Chacun d’entre nous est atteint, à un degré plus ou moins grand, du complexe de Procuste, et nous promenons sur le monde un regard qui n’en voit plus la gaieté là même où elle demeure, un regard qui ne reconnaît plus que le noirâtre, le blanchâtre et une infinité de grisés, un triste regard de daltonien ou d’animal. »
Vladimir Volkoff
Le complexe de Procuste, éditions Julliard – L’Âge d’Homme, 1981
« Bourgogne n’était pas en reste dans l’affection au chef, mais autour d’une page, il livrait une autre clé : “Si nous étions malheureux, mourant de faim et de froid, il nous restait encore quelque chose qui nous soutenait : l’honneur et le courage.” L’honneur et le courage ! Comme ils résonnaient étrangement, ces mots, deux cents années plus tard. Étaient-ils encore en vie, ces mots, dans ce monde que nous traversions pleins phares ? Nous fîmes une courte halte sur le bas-côté, il neigeait, la nuit semblait en larmes dans le faisceau des phares. Dieux, me disais-je, en pissant dans le noir, nous autres, pauvres garçons du XXIème siècle, ne sommes-nous pas des nains ? Alanguis dans la mangrove du confort, pouvions-nous comprendre ces spectres de 1812 ? »
Sylvain Tesson
Berezina, éditions Guérin, 2015
« À ce propos aussi Androlicas a laissé par écrit un mot que voulait dire Lysandre, par où il appert qu’il faisait bien peu de compte de se parjurer ; car il disait “qu’il fallait tromper les enfants avec des osselets, et les hommes avec les serments”, suivant en cela Polycrate, le tyran de Samos, mais non pas avec raison ; car lui était capitaine légitime et l’autre violent usurpateur de domination tyrannique ; et ce n’était point fait en vrai Laconien de se comporter envers les dieux ni plus ni moins qu’envers les ennemis, ou encore pirement et plus injurieusement ; car celui qui trompe son ennemi, moyennant la foi qu’il lui jure, donne à connaître qu’il le craint, mais qu’il ne se soucie point des dieux. »
Plutarque
Vies parallèles (in Vie de Lysandre), entre 100 et 120, trad. Anne-Marie Ozanam, éditions Gallimard, coll. Quarto, 2002
« Cette idée d’un bien à sauver et à transmettre est à la base du code d’honneur paysan. Elle s’oppose à toutes les tentations de l’individualisme : l’homme, anneau dans une chaîne, sent obscurément qu’il doit résister jusqu’au bout pour que la chaîne ne se brise pas. C’est cet instinct de continuité qui courbe jusqu’à la mort le vieux paysan sur la terre et lui inspire cette horreur quasi physique de tomber à la charge de ses enfants ou de ses proches. Et c’est de lui que procède aussi ce savoir-vivre dont la délicatesse et la profondeur débordent à l’infini le savoir-faire. Tout dans la conduite de l’existence, depuis le menu quotidien jusqu’au choix d’une épouse, est dominé par ce sentiment du patrimoine qui, comme le flambeau ambulant des coureurs antiques, lie l’individu à son rang et le transporte au-delà de lui-même. »
Gustave Thibon
Paysages du Vivarais, 1949
« Au fil des siècles, chez les peuples européens et dans chacune de leurs cultures particulières, les formes du pouvoir nobiliaire n’ont pas cessé de changer, et souvent de façon rapide, mais la fonction politique et morale de la noblesse, en Grèce, à Rome, en Germanie, dans l’Europe médiévale ou moderne, est restée identique pour l’essentiel. La noblesse n’est pas l’aristocratie ; il y a des aristocraties de la fortune et de l’argent. Elle n’est que partiellement dépendante de l’hérédité. Elle repose sur le mérite, et celui-ci doit toujours être confirmé. La noblesse se gagne et se perd. Elle vit sur l’idée que le devoir et l’honneur sont plus importants que le bonheur individuel. Ce qu’elle a en propre c’est son caractère public. Elle est faite pour diriger la chose publique, la res publica. Sa vocation n’est pas d’occuper le sommet de la société mais le sommet de l’État. Ce qui la distingue, ce ne sont pas les privilèges, mais le fait d’être sélectionnée pour commander. Elle gouverne, juge et mène au combat. La noblesse est associée à la vigueur des libertés publiques. Ses terres d’élection sont les libertés féodales et les monarchies aristocratiques ou constitutionnelles. Elle est impensable dans les grandes tyrannies orientales, Assur ou l’Égypte. En Europe même, elle s’étiole ou disparaît chaque fois que s’établit un pouvoir despotique, ce qu’est le centralisme étatique. Elle implique une personnalisation du pouvoir qui humanise celui-ci à l’inverse de la dictature anonyme des bureaux. »
Dominique Venner
Histoire et tradition des Européens, Éditions du Rocher, coll. Histoire, 2002
« Sur le linteau de la cheminée de Diane de Poitiers, cette expression est gravée : “Nul plat venu d’ailleurs”. Se nourrir du produit de son voisinage était alors un honneur. Avoir du sang picard, lorrain ou tourangeau signifiait cela : irriguer ses veines avec les fruits de son terroir. »
Sylvain Tesson
Dans les forêts de Sibérie, éditions Gallimard, 2011
« Les liens de famille m’ont toujours paru sacrés ; je ne puis me décider à croire qu’on puisse les rompre sans déshonneur et sans manquer à ce qu’il y a de plus saint pour l’homme. »
Napoléon Bonaparte
Virilités, maximes et pensées compilées par Jules Bertaut, éditions Sansot et Cie, 1912