« La termitière future m’épouvante. Et je hais leur vertu de robots. Moi, j’étais fait pour être jardinier. »
Antoine de Saint-Exupéry
Lettre à Pierre Dalloz, 30 juillet 1944
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Source : wikipedia
« La termitière future m’épouvante. Et je hais leur vertu de robots. Moi, j’étais fait pour être jardinier. »
Antoine de Saint-Exupéry
Lettre à Pierre Dalloz, 30 juillet 1944
« Vieux bureaucrate, mon camarade ici présent, nul jamais ne t’a fait évader et tu n’en es point responsable. Tu as construit ta paix à force d’aveugler de ciment, comme le font les termites, toutes les échappées vers la lumière. Tu t’es roulé en boule dans ta sécurité bourgeoise, tes routines, les rites étouffants de ta vie provinciale, tu as élevé cet humble rempart contre les vents et les marées et les étoiles. Tu ne veux point t’inquiéter des grands problèmes, tu as eu bien assez de mal à oublier ta condition d’homme. Tu n’es point l’habitant d’une planète errante, tu ne te poses point de questions sans réponse : tu es un petit bourgeois de Toulouse. Nul ne t’a saisi par les épaules quand il était temps encore. Maintenant, la glaise dont tu es formé a séché, et s’est durcie, et nul en toi ne saurait désormais réveiller le musicien endormi ou le poète, ou l’astronome qui peut-être t’habitait d’abord. »
Antoine de Saint-Exupéry
Terre des hommes, éditions Gallimard, 1939
« Sentinelle, sentinelle, c’est en marchant le long des remparts dans l’ennui du doute qui vient des nuits chaudes, c’est en écoutant les bruits de la ville quand la ville ne te parle pas, c’est en surveillant les demeures des hommes quand elles sont morne assemblage, c’est en respirant le désert autour quand il n’est que vide, c’est en t’efforçant d’aimer sans aimer, de croire sans croire, et d’être fidèle quand il n’est plus à qui être fidèle, que tu prépares en toi l’illumination de la sentinelle, qui te viendra parfois comme récompense et don de l’amour. »
Antoine de Saint-Exupéry
Citadelle, éditions Gallimard, coll. Blanche, 1948, coll. Folio, 2000
« La mère n’avait point seulement transmis la vie : elle avait, à ses fils, enseigné un langage, elle leur avait confié un bagage si lentement accumulé au cours des siècles, le patrimoine spirituel qu’elle avait elle-même reçu en dépôt, ce petit lot de traditions, de concepts et de mythes qui constitue toute la différence qui sépare Newton ou Shakespeare de la brute des cavernes. »
Antoine de Saint-Exupéry
Terre des hommes, 1939
« Beaucoup s’ennuient et rêvent de la soupe, car si tous les dieux dorment en toi, ne te reste que l’appel des satisfactions de ton ventre. »
Antoine de Saint-Exupéry
Citadelle, éditions Gallimard, 1948
« Ne comprenez-vous pas que le don de soi, le risque, la fidélité jusqu’à la mort, voilà des exercices qui ont largement contribué à fonder la noblesse de l’homme ? Quand vous cherchez un modèle à proposer, vous le découvrez chez le pilote qui se sacrifie pour son courrier, chez le médecin qui succombe sur le front des épidémies, ou chez le méhariste qui, à la tête de son peloton maure, s’enfonce vers le dénuement et la solitude. Quelques-uns meurent chaque année. Si même leur sacrifice est en apparence inutile, croyez-vous qu’ils n’ont point servi ? Ils ont frappé la belle pâte vierge que nous sommes d’abord une belle image, ils ont ensemencé jusqu’à la conscience du petit enfant, bercé par des contes nés de leurs gestes. Rien ne se perd et le monastère clos de murs, lui-même, rayonne. »
Antoine de Saint-Exupéry
Un sens à la vie, 1938
« On marche une certaine nuit de l’année dans la neige, laquelle est craquante, sous les étoiles, vers des maisons de bois illuminées. Et si tu entres dans leur lumière après ta route et colles ton visage aux carreaux, tu découvres de cette clarté qu’elle vient d’un arbre. Et l’on te dit que c’est une nuit qui a le goût des jouets de bois vernis et une odeur de cire. Et l’on te dit des visages de cette nuit-là qu’ils sont extraordinaires. Car ils sont l’attente d’un miracle. Et tu vois tous les vieux qui fixent les yeux des enfants, et se préparent à de grands battements de cœur. Car il va passer dans ces yeux d’enfants quelque chose d’insaisissable qui n’a point de prix. Car tu as bâti toute l’année par l’attente et surtout par tes airs entendus et tes allusions secrètes et l’immensité de ton amour. »
Antoine de Saint-Exupéry
Citadelle, éditions Gallimard, 1948
« On est frère en quelque chose et non frère tout court. Le partage n’assure pas la fraternité. Elle se noue dans le seul sacrifice. Elle se noue dans le don commun à plus vaste que soi. »
Antoine de Saint-Exupéry
Pilote de guerre, éditions Gallimard, 1942, coll. Folio, 2011
« Si tu veux comprendre le mot bonheur, il faut l’entendre comme récompense et non comme but. »
Antoine de Saint-Exupéry
Citadelle, éditions Gallimard, 1948
« Le disparu, si l’on vénère sa mémoire, est plus précieux et plus puissant que le vivant. »
Antoine de Saint-Exupéry
Citadelle, éditions Gallimard, 1948
« Il n’y a pas de hasard, il y a des forces en marche ; à toi de les créer, le hasard suivra. »
Antoine de Saint-Exupéry
Citadelle, éditions Gallimard, 1948
« Peu à peu nous découvrons que le rire clair de celui-là nous ne l’entendrons plus jamais, nous découvrons que ce jardin-là nous est interdit pour toujours. Alors commence notre deuil véritable qui n’est point déchirant mais un peu amer.
Rien, jamais, en effet ne remplacera le compagnon perdu. On ne se crée point de vieux camarades. Rien ne vaut le trésor de tant de mauvaises heures vécues ensemble, de tant de brouilles, de réconciliations, de mouvements de cœur. On ne reconstruit point ces amitiés-là. Il est vain si l’on plante un chêne, d’espérer s’abriter bientôt sous son feuillage.
Ainsi va la vie. Nous nous sommes enrichis d’abord, nous avons planté pendant des années, mais viennent les années où le temps défait ce travail et déboise. Les camarades, un à un, nous retirent leur ombre. Et à nos deuils se mêle désormais le regret secret de vieillir. »
Antoine de Saint-Exupéry
Terre des hommes, éditions Gallimard, 1939