« Quand des hommes combattent sur un plan supérieur, spirituel, ils intègrent la mort dans leur stratégie. Ils acquièrent quelque chose d’invulnérable ; la pensée que l’adversaire veut leur destruction physique n’est, par conséquent, plus effrayante pour eux. […] Il y a des moments dans l’histoire où des hommes saisissent la mort comme un bâton de commandement. Dans le procès des Templiers, par exemple, où le Grand Maître de l’Ordre montre soudainement le vrai rapport entre lui et les juges — ainsi un navire laisse tomber son camouflage et s’offre, avec ses pavillons et ses canons, au regard stupéfait. Le soir même, il fut brûlé vif, mais on posta des gardes, dès cette nuit, à l’endroit du bûcher pour empêcher le peuple d’y venir chercher des reliques. La poussière elle-même fait peur aux tyrans ; elle aussi doit disparaître. »
Ernst Jünger
Premier journal parisien (in Strahlungen), 1949, éditions Le Livre de poche, 1998