« Une vaste tapisserie des Gobelins illustrant une scène de bataille pendait au mur. Un chevalier plantait sa lance dans la poitrine d’un fantassin ployé en arrière par la force du coup. La tapisserie s’était fanée avec le temps et le flot de sang qui s’épanouissait à la poitrine de l’homme se teintait de la nuance roussâtre d’un vieux furoshiki. Le sang et les fleurs se ressemblaient, pensa Isao, en ce que tous deux étaient prompts à sécher, prompts à changer de substance. C’était pourquoi, précisément, le sang et les fleurs pouvaient continuer à vivre en revêtant la substance de la gloire. La gloire sous toutes ses formes était inévitablement chose métallique. »
Yukio Mishima
Chevaux échappés, 1969, trad. Tanguy Kenec’hdu, éditions Gallimard 1980, coll. Quarto, 2004