« Si on tire une ligne du golfe de Venise à l’embouchure de l’Elbe, on trouve en dehors de cette ligne, et sur toute sa lon­gueur, les restes, les débris des popu­la­tions slaves refou­lées vers le nord par la race ger­ma­nique et par la race romane. Leur exis­tence post­hume ici, n’appartient déjà plus qu’au pas­sé ; mais plus loin, vers les Kar­pats, ce rem­part sécu­laire de la Sla­vie, aux deux extré­mi­tés de l’Europe, on voit les races slaves enga­gées dans des luttes achar­nées. Sur la mer Adria­tique, elles com­battent l’islamisme ; et, sur la mer Bal­tique, sou­mises d’abord à une race étran­gère, elles se sont rele­vées, elles prennent aujourd’hui le des­sus. Entre ces points extrêmes, le tronc slave s’étend dans toute sa force et jette deux branches, l’une vers l’Amérique, l’autre à tra­vers les Mon­gols et les Cau­ca­siens, jusque dans le sein de la Perse et presque de la Chine, rega­gnant ain­si dans cette par­tie du monde ce qu’il a per­du de ses pos­ses­sions en Europe. »

Adam Mickie­wicz
Les Slaves, Cours pro­fes­sé Col­lège de France, pre­mière leçon, Comon édi­teur, vol. 1, 1849