Un projet de l'Institut ILIADE pour la longue mémoire européenne

Citatio, un portail ouvert sur notre civilisation

Nous menons un travail long et exigeant afin d'assurer la qualité des milliers de citations que nous vous proposons. Tout cela a un coût que vous pouvez nous aider à supporter en faisant un don.

Le livre
La Comédie de Charleroi

La Comédie de Charleroi

Auteur : Pierre Drieu la Rochelle
Édi­teur : édi­tions Gal­li­mard, 1934, coll. L’I­ma­gi­naire (13 sep­tembre 1996)

Pré­sen­ta­tion par l’au­teur : « Je me rap­pelle deux ans plus tard, en face de moi, ce grand diable d’of­fi­cier alle­mand debout dans la tour­mente, à Ver­dun, Fritz von X…, qui était debout, et appe­lait, et m’ap­pe­lait. Et je ne lui répon­dais pas, je le canar­dais de loin.
Dans cette guerre, on s’ap­pe­lait, on ne se répon­dait pas. J’ai sen­ti cela, au bout d’un siècle de course. On a sen­ti cela. Je ne fai­sais plus que ges­ti­cu­lailler, criailler.
Je n’a­van­çais plus guère. Je tré­bu­chais, je tombais.
Ils tré­bu­chaient, ils tombaient.
Je sen­tais cela. Je sen­tais l’Homme mou­rir en moi. »

Acheter chez un libraire indépendant

Découvrez 7 citations extraites du livre

Le curé ressemblait au maire...

« Le curé res­sem­blait au maire, sauf qu’il n’a­vait pas de mous­taches. C’é­tait en effet, de par la fonc­tion, son frère jumeau. C’est ain­si que fonc­tionne le monde : dans chaque vil­lage, dans chaque cam­pe­ment, il y a un sor­cier et un chef. Ils se détestent, mais sont com­plices, et les bonnes gens ont bien besoin d’eux. »

Pierre Drieu la Rochelle
La Comé­die de Char­le­roi, 1934, édi­tions Gal­li­mard, coll. L’Imaginaire, 1996

À quoi sert de vivre...

« À quoi sert de vivre, si on ne se sert pas de sa vie pour la cho­quer contre la mort, comme un bri­quet ? Guerre – ou révo­lu­tion, c’est-à-dire guerre encore – il n’y a pas à sor­tir de là. Si la mort n’est pas au cœur de la vie comme un dur noyau – la vie, quel fruit mou et bien­tôt blet ? »

Pierre Drieu la Rochelle
La Comé­die de Char­le­roi, 1934, édi­tions Gal­li­mard, coll. L’Imaginaire, 1996

La forme fatale d’une société, c’est d’être une patrie...

« La forme fatale d’une socié­té, c’est d’être une patrie, plus ou moins large. Un civi­li­sé montre son amour de la civi­li­sa­tion en adhé­rant à tout le conte­nu de cette pro­po­si­tion, en adhé­rant à l’état de guerre per­ma­nent. Si l’on accepte l’idée de patrie, on accepte la guerre. Car point de patrie sans guerre et pas de guerre sans patrie. Qui aime la patrie aime la guerre. »

Pierre Drieu la Rochelle
La Comé­die de Char­le­roi, 1934, édi­tions Gal­li­mard, coll. L’Imaginaire, 1996

Je ne serai pas quelqu’un ; je serai, simplement...

« Je ne serai pas quel­qu’un ; je serai, sim­ple­ment. Un homme, l’Homme qui est au milieu du monde – sans qu’il y ait de dieux pour le regar­der. Car je ne suis pas une pen­sée, un rêve, une luciole fugi­tive. Je suis en chair et en os. D’a­bord en chair et en os. Ce qui est bien, c’est que je suis nu, c’est-à-dire sans argent, avec une che­mise de rechange, un homme qui a res­ti­tué en lui le rudi­ment de toute réa­li­té, qui tra­vaille avec ses mains et ses pieds, qui mange, qui boit, qui dort.
[…] Qu’est-ce que je fais là ? Je suis un homme. J’ai été pro­mis à un monde d’hommes et d’animaux. Mes ancêtres n’ont pas tra­vaillé à une civi­li­sa­tion pour que sou­dain nous n’y puis­sions plus rien et que le mou­ve­ment se perde machi­nal, aveugle, absurde ? Une machine, un canon qui tire sans arrêt, tout seul. Qu’est-ce que cela ? Ce n’est ni un homme, ni un ani­mal, ni un dieu. C’est un cal­cul oublié qui pour­suit seul sa tra­jec­toire à tra­vers le monde, c’est un rési­du incroyable. Quelle est cette reprise étrange de la matière sur la vie ? Quel est ce dérou­le­ment méca­nique de la matière ? Des mots absurdes deviennent vrais : méca­nisme, maté­ria­lisme. »

Pierre Drieu la Rochelle
La Comé­die de Char­le­roi, 1934, édi­tions Gal­li­mard, coll. L’Imaginaire, 1996

Comme je le craignais, mes nerfs furent d’abord...

« Comme je le crai­gnais, mes nerfs furent d’abord rebrous­sés au contact de cette huma­ni­té qui n’est jamais si laide que dans ces orgies de vani­té à bon mar­ché où des mil­liers d’invitations lan­cées au hasard ras­semblent pêle-mêle les ministres et les concierges, les par­ve­nus et les res­quilleurs, les célé­bri­tés éphé­mères et les ratés avides de faux sem­blant, les légi­times et les illé­gi­times, les gardes muni­ci­paux, les pick­po­ckets, les ouvreuses, tant de gens laids, mal habillés, secrè­te­ment sales, ivres de la plus fade tisane d’amour-propre. »

Pierre Drieu la Rochelle
La Comé­die de Char­le­roi, 1934, édi­tions Gal­li­mard, coll. L’Imaginaire, 1996

Non seulement un homme, un chef...

« Je me levai, tout entier. […] Qu’est-ce qui sou­dain jaillis­sait ? Un chef. Non seule­ment un homme, un chef. Non seule­ment un homme qui se donne, mais un homme qui prend. Un chef, c’est un homme à son plein ; l’homme qui donne et qui prend dans la même éja­cu­la­tion. J’étais un chef. Je vou­lais m’emparer de tous ces hommes autour de moi, m’en accroître, les accroître par moi et nous lan­cer tous en bloc, moi en pointe, à tra­vers l’univers. »

Pierre Drieu la Rochelle
La Comé­die de Char­le­roi, 1934, édi­tions Gal­li­mard, coll. L’Imaginaire, 1996

Auteurs

Auteurs récemment ajoutés