« Mais, à mesure que le progrès se développe, il se démasque. Il vise beaucoup moins le bonheur que la puissance. »
Emmanuel Berl
La France irréelle, 1957, Éditions Grasset, coll. Les Cahiers Rouges, 1996
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« Mais, à mesure que le progrès se développe, il se démasque. Il vise beaucoup moins le bonheur que la puissance. »
Emmanuel Berl
La France irréelle, 1957, Éditions Grasset, coll. Les Cahiers Rouges, 1996
« En réalité, le progressisme, nous l’avons dit, n’est pas une option politique, mais une neutralisation de la politique. Il ne consiste pas à considérer qu’un progrès est désirable — ce qui est une tautologie, mais à considérer que tout mouvement est un progrès. De ce point de vue, la seule maxime qui reste à la politique est l’injonction de tout faire pour libérer le mouvement, pour défaire les immobilismes, pour déconstruire les barrières, pour “laisser faire et laisser passer”. La politique est conduite par là à s’effacer pour que plus rien ne puisse empêcher la circulation universelle des personnes et des choses, orchestrée par l’économie marchande. »
François-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échapper à l’ère du mouvement perpétuel, Éditions Grasset, 2018
« Qui ne sait le charme des landes ?… Il n’y a peut-être que les paysages maritimes, la mer et ses grèves, qui aient un caractère aussi expressif et qui vous émeuvent davantage. Elles sont comme les lambeaux, laissés sur le sol, d’une poésie primitive et sauvage que la main et la herse de l’homme ont déchirée. Haillons sacrés qui disparaîtront au premier jour sous le souffle de l’industrialisme moderne ; car notre époque, grossièrement matérialiste et utilitaire, a pour prétention de faire disparaître toute espèce de friche et de broussailles aussi bien du globe que de l’âme humaine. »
Jules Barbey d’Aurevilly
L’Ensorcelée, 1852, éditions Gallimard, coll. Folio classique, 1977
« Asservie aux idées de rapport, la société, cette vieille ménagère qui n’a plus de jeune que ses besoins et qui radote de ses lumières, ne comprend pas plus les divines ignorances de l’esprit, cette poésie de l’âme qu’elle veut échanger contre de malheureuses connaissances toujours incomplètes, qu’elle n’admet la poésie des yeux, cachée et visible sous l’apparente inutilité des choses. Pour peu que cet effroyable mouvement de la pensée moderne continue, nous n’aurons plus, dans quelques années, un pauvre bout de lande où l’imagination puisse poser son pied ; pour rêver, comme le héron sur une de ses pattes. Alors, sous ce règne de l’épais génie des aises physiques qu’on prend pour de la Civilisation et du Progrès, il n’y aura ni ruines, ni mendiants, ni terres vagues, ni superstitions comme celles qui vont faire le sujet de cette histoire, si la sagesse de notre temps veut bien nous permettre de la raconter. »
Jules Barbey d’Aurevilly
L’Ensorcelée, 1852, éditions Gallimard, coll. Folio classique, 1977
« Rien n’est nouveau. Pestes et choléras fauchent les hommes depuis longtemps. L’Histoire, cette contradiction de l’idée de progrès, n’est que l’éternel retour des désastres et des renaissances. Mais nous avons changé d’échelle. Quand un système change d’échelle, il change de nature. »
Sylvain Tesson
Que ferons-nous de cette épreuve ?, entretien au Figaro, par Vincent Tremolet de Villers, 20 mars 2020
« L’architecte a introduit dans le circuit des entrepreneurs qui introduisent des fournisseurs, des sociétés anonymes ne tardent pas à apparaître, et voilà constituée une de ces “Grandes Compagnies”, une de ces invasions de barbares venus de l’intérieur, sous les pas desquelles l’herbe ne pousse plus. Tout est détruit, rasé, raclé ; quelqu’un s’insurge, défend un bel hôtel, un assemblage de pierres admirable, une porte monumentale, on l’abat sous les sarcasmes avec l’arme totale, l’imparable, celle à laquelle le primaire ne résiste pas : la nécessité de marcher avec son temps, et, s’il insiste, avec le mot “progrès” qui est la bombe atomique des raisonnements imbéciles. »
Jean Giono
Les terrasses de l’île d’Elbe, 1976, éditions Gallimard, coll. L’Imaginaire, 2017
« Nous en sommes arrivés, sans nous en rendre compte, à un régime où il n’est pas permis de penser incorrectement, et où il n’est pas permis non plus de vivre incorrectement. Comme le marxisme, la démocratie tient qu’il existe une vérité morale parce qu’elle croit comme le marxisme à un progrès de l’humanité et par conséquent à un sens de l’histoire. »
Maurice Bardèche
Sparte et les Sudistes, éditions Les Sept Couleurs, 1969
« Si les profits de la traite expliquaient la révolution industrielle, aujourd’hui le Portugal devrait être une grande puissance, d’autant plus que ce pays a décolonisé beaucoup plus tard. Or, le Portugal n’a jamais fait sa révolution industrielle et, jusqu’à son entrée dans l’Europe, était une sorte de tiers-monde. »
Bernard Lugan
Refuser la repentance coloniale, allocution au cinquième colloque de l’Institut Iliade, Paris, Maison de la Chimie, 7 avril 2018
« Ce qui est en jeu, ce n’est pas d’arrêter le mouvement ; c’est au contraire de sauver la possibilité d’un mouvement authentique. Pour qu’un changement effectif nous approche du meilleur, encore faut-il un point d’appui : “Donnez-moi, demandait Archimède, un point fixe et un levier, et je soulèverai la terre.” Si l’on nous refuse tout point fixe, nos leviers même les plus puissants ne nous serviront à rien… En affirmant que tout est mobile, on tue en fait le mouvement. Le progressisme a détruit l’idée de progrès en décrivant le changement comme nécessaire par principe. Il faut sauver de cette illusion absurde les progrès véritables dont nous avons besoin : et voilà comment nous pourrons remettre la main sur notre propre destin. »
François-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échapper à l’ère du mouvement perpétuel, Éditions Grasset, 2018
« La science elle-même se déploie dans le temps, bien sûr : elle découvre peu à peu de nouvelles connaissances, de nouvelles vérités, qui ajustent l’une après l’autre notre représentation du réel. Mais si la science a une histoire, c’est celle d’un mouvement vers cette vérité qui n’en a pas, et dont la nécessité est étrangère à nos découvertes. L’histoire des sciences a un sens, parce que les sciences s’approchent peu à peu dans le temps de ce qui est extérieur au temps. Et on peut parler de ce cheminement de la science comme d’un progrès, si l’on considère ce cheminement par rapport à l’objectif immuable que constitue la vérité, vers laquelle tout chercheur tente simplement d’avancer.
On ne peut donc parler de progrès que pour décrire un mouvement qui se connaît pour but un point d’arrivée immobile. »
François-Xavier Bellamy
Demeure. Pour échapper à l’ère du mouvement perpétuel, Éditions Grasset, 2018
« Je leur dis : pourquoi voulez-vous exercer un gouvernement des esprits. Et comme tous les autres pourquoi voulez-vous exercer un gouvernement temporel des esprits. Pourquoi voulez-vous avoir une politique, et l’imposer. Pourquoi voulez-vous avoir une métaphysique, et l’imposer. Pourquoi voulez-vous avoir un système quelconque, et l’imposer.
Vous êtes faits pour apprendre à lire, à écrire et à compter. Apprenez-leur donc à lire, à écrire et à compter. Ce n’est pas seulement très utile. Ce n’est pas seulement très honorable. C’est la base de tout. Il sait ses quatre règles, disait-on de quelqu’un quand j’étais petit. Qu’ils nous apprennent donc nos quatre règles. Je ne veux pas jouer sur les mots, mais sans parler d’écrire ce serait déjà un grand progrès, (puisque nous sommes dans un système du progrès), que d’avoir, que d’être un peuple qui saurait lire et qui saurait compter. »
Charles Péguy
L’Argent, Les Cahiers de la Quinzaine, 1913, Éditions des Équateurs, coll. Parallèles, 2008
« Il n’y a pas de progrès qui vaille (et qui puisse rendre superflu la fonction que peut avoir la religion au sens le plus haut et sévère, pour l’homme non dégradé), quand il s’agit de problèmes plus réels, qui sont ceux de la mort, de l’angoisse existentielle, de bouleversements dus à l’irruption de l’irrationnel, aux passions et aux instincts eux-mêmes. Croire le contraire, croire que le progrès, la science, la technocratie ou même le Christ quand il est présenté comme un modèle d’altruisme humanitaire, puisse résoudre de tels problèmes, relève du primitivisme et d’un manque complet de sens du tragique de la vie et de la condition humaine. »
Julius Evola
Il Conciliatore, 15 juin 1969